La Coupe d'Afrique des Nations (CAN), événement sportif majeur sur le continent, est traditionnellement un moment de communion nationale et panafricaine accessible à tous. Cette tradition est cependant menacée par une nouvelle politique de commercialisation des droits mise en place par la Confédération Africaine de Football (CAF) et son agent commercial. Réunies le samedi dernier à Lomé, au Togo, plusieurs chaînes de télévision nationales publiques et privées africaines ont exprimé un désaccord total face à cette nouvelle répartition proposée. Selon ces médias, seules 32 des 52 rencontres seraient accessibles gratuitement (en clair) aux télévisions nationales africaines, un modèle de partage jugé inacceptable.
La fracture des 32 matchs : un modèle jugé inéquitable
Le nœud du conflit réside dans cette restriction numérique. En limitant la diffusion en clair à 32 matchs, la CAF réserve les 20 autres rencontres cruciales (phases finales et affiches importantes) aux opérateurs de télévision payante.
Cette démarche est jugée contraire au principe d'accès universel à la compétition. Les responsables des chaînes signataires affirment qu'ils entendent garantir aux populations « l'accès intégral aux 52 matchs », rappelant que la CAN demeure un événement fédérateur essentiel de cohésion sociale.
Les médias estiment également qu’appliquer un modèle économique inspiré de celui de l’Europe ou de la FIFA, sans en reproduire les mécanismes de financement, revient à faire payer deux fois les populations africaines : une première fois via les budgets publics qui soutiennent leurs chaînes nationales, et une seconde fois via les abonnements à la télévision payante. En Côte d’Ivoire, par exemple, ce sont les chaînes la RTI chaîne nation ivoirienne (publique) et la NCI (privée) qui diffuseront les matchs 32 sur les 52 obligeant de nombreux foyers modestes à payer un abonnement pour suivre l'intégralité du tournoi.
Les télévisions estiment que cette approche porte atteinte à l'égalité d'accès à un bien commun, marginalise les couches sociales les plus vulnérables et remet en cause le rôle et les missions du service public audiovisuel. Elles dénoncent également une différence de traitement par rapport à d’autres zones linguistiques qui se verraient accorder l'intégralité des 52 matchs.
La « déclaration de Lomé » : L'exigence du continent
Face à cette menace sur l'accès populaire au football, les dirigeants des chaînes ont formalisé leur protestation dans la Déclaration de Lomé. Ils ont désigné un porte-parole :
Pape Allé Niang, Porte-parole du Collectif des Chaînes Nationales Publiques et Privées Africaines diffusant la CAN 2025.
Celui-ci a fermement dénoncé la décision, rappelant que la CAN est, par essence, une affaire africaine et que son financement repose en grande partie sur les États africains et le contribuable africain. Rendre une partie de la compétition payante revient, selon les protestataires, à spolier les peuples africains de ce qui leur appartient collectivement.
Quel arbitrage pour l'avenir du football africain ?
La pression est désormais maximale sur la CAF. La Déclaration de Lomé a clairement posé les enjeux sociaux et idéologiques du débat. La Confédération est sommée de choisir entre la maximisation des revenus commerciaux pour son agent et la préservation de l'esprit populaire et inclusif de sa compétition phare. La réponse qui sera donnée à cette contestation définira si la prochaine CAN restera un événement pour tous les Africains ou si elle marquera le début d'une ère où le football africain s’éloignera de ses racines pour devenir un privilège réservé à ceux qui peuvent payer.


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