À seulement quelques jours de l’élection présidentielle ivoirienne, l'ancien président Laurent Gbagbo sort de son silence dans une interview accordée à Alain Foka. À 80 ans, l’ex-chef d’État, revenu de dix années d’exil, annonce un retrait imminent de la scène politique tout en dénonçant ce qu’il qualifie de manipulation et de “braquage électoral” autour du scrutin du 25 octobre.
Après les législatives, je vais démissionner de la tête du Parti, je vais prendre du temps pour moi-même… je vais vivre enfin
déclare Gbagbo, affirmant ne plus vouloir occuper de fonctions politiques. Il confie que cette décision marque pour lui la fin d’un long combat politique et le début d’une quête de sérénité personnelle, après des décennies de luttes et d’épreuves.
Mais malgré cette volonté de retrait, il reste extrêmement lucide sur le climat électoral et la situation politique du pays
Le retour assumé dans l’arène politiqueLe retour assumé dans l’arène politique
Gbagbo révèle avoir accepté de se présenter à l’élection présidentielle de 2025 pour « remettre ça » face à Ouattara, assumant pleinement son retour sur la scène politique. L'ancien président affirme que sa candidature était motivée par la volonté de rejouer, pacifiquement, la présidentielle de 2010
En 2010, j'ai gagné. Le conseil constitutionnel m'a proclamé vainqueur. Il [Alassane Ouattara] a contesté. Mais moi, je suis sûr que je l'ai battu. […] On va remettre ça pour voir qui a vraiment gagné
a-t-il déclaré. Ce « match » n'aura finalement pas lieu, son adversaire ayant écarté sa candidature.
Gbagbo charge le pouvoir en place
L’ancien président n’y va pas par quatre chemins. Selon lui, plusieurs candidats, y compris ceux qui pouvaient réellement contester le pouvoir en place, ont été écartés pour des raisons électoralistes.
Ceux qui peuvent gagner ces élections ont été écartés. Je n’accepte pas ça. Ce qui va se faire le 25 octobre, ce n’est pas une élection… C’est un coup d’État civil. C’est un braquage électoral.
assène-t-il, dénonçant ouvertement la manière dont la candidature de certains a été annulée.
Concernant sa propre candidature, Gbagbo explique :
Ma candidature a été écartée sous prétexte que j’aurais été condamné pour le braquage de la BCAO… ce qui est faux. La BCAO n’a jamais déposé plainte. Tous les autres ont été amnistiés, sauf moi. C’est pour des raisons électoralistes que j’ai été écarté.
Il a ajouter:
On veut effacer la vérité et m’effacer avec
Tout en soulignant sa volonté d’éviter la violence, il précise :
Je n'appelle pas à descendre dans les rues, mais je soutiens pleinement ceux qui manifestent pour dire non à ce braquage électoral, je suis avec eux.
réaffirmant son soutien aux citoyens qui dénoncent ce qu’il qualifie de système électoral « truqué d’avance.
À 80 ans, il ne se laisse pas effacer : Gbagbo parle
Revenant sur son âge et sa santé, Gbagbo rappelle que gouverner ne se résume pas à la force physique :
À 80 ans, on n’est pas en pleine santé. Mais gouverner, ce n’est pas courir les 100 mètres tous les matins… La lucidité ne m’a jamais fait défaut.
Et sur l’opposition, il est catégorique :
Tous ceux qui sont candidats à nous, nous n’appelons pas à voter pour eux
Une déclaration qui laisse présager un vote blanc massif parmi ses partisans.
Liberté et recul démocratique
L’ancien président se montre également critique sur le recul des libertés dans le pays :
J’ai apporté la liberté ici. Aujourd’hui, il y a un recul : des gens sont arrêtés pour avoir simplement manifesté. Sous moi, même pendant la guerre civile, on ne voyait pas ça.
Laurent Gbagbo, fidèle à lui-même, ne mâche pas ses mots et met en lumière une Côte d’Ivoire où le climat politique reste tendu et où, selon lui, l’élection présidentielle n’est pas celle qu’on croit.
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