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Retro : Quand les Agnis se sont exilés au Ghana pour fuir Houphouët Boigny

Retro : Quand les Agnis se sont exilés au Ghana pour fuir Houphouët Boigny/Le roi Amon N'Douffou  III et sa cour
Retro : Quand les Agnis se sont exilés au Ghana pour fuir Houphouët Boigny/Le roi Amon N'Douffou III et sa cour

L'Affaire du Sanwi est l’un des épisodes les plus significatifs de l’histoire de la Côte d'Ivoire, une lutte qui a duré plusieurs décennies, de 1959 à 1973, et qui a profondément influencé les relations politiques et sociales du pays. Elle a opposé le peuple Agni, principalement du royaume Sanwi à Félix Houphouët Boigny dans les années 60. Voici une rétrospective chronologique de ce conflit.

L’origine du conflit : La revendication d’indépendance du Sanwi (1959)

Tout commence en 1959, année où toute l'Afrique est en pleine décolonisation. La région du Sanwi, gouvernée par le roi Amon N'douffou III, demande la secession et la reconnaissance en Etat indépendant vis à vis de la Côte d'Ivoire. Et ce en vertu d’un traité de protectorat signé en 1843 entre le roi Amon N'Douffou III et la France.

Ainsi, le 3 mai 1959, les autorités du Sanwi proclament la "République indépendante du Sanwi", un gouvernement dirigé par Armand Ernest Attié sous l’autorité du roi. Ce geste est perçu par le gouvernement ivoirien comme une tentative de sécession et déclenche une réponse rapide. Le gouvernement ivoirien considère que les traités passés avec la France sont devenus obsolètes avec la création de la Côte d’Ivoire en tant que colonie française en 1893, et refuse de reconnaître la légitimité de ce mouvement séparatiste.

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L’isolement et l’exil (1959-1961)

Devant l'intensification des tensions et la pression croissante des forces ivoiriennes, le gouvernement du Sanwi se réfugie au Ghana, où il trouve soutien auprès du président Kwame Nkrumah, un fervent panafricain et défenseur de l’indépendance totale des nations africaines. Nkrumah et les dirigeants du Sanwi appellent à l'aide internationale et saisissent l'Organisation des Nations Unies (ONU) et l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) pour obtenir la reconnaissance de l'indépendance du Sanwi.

Les autorités ivoiriennes, soutenues par la France, réagissent fermement et demandent l’arrestation des émissaires du Sanwi, qu’ils jugent responsables de la tentative de sécession. En mai 1960, le roi Amon N'douffou III et plusieurs de ses proches sont arrêtés et emprisonnés pour atteinte à la sûreté de l’État.

L’amnistie et les tentatives de résolution (1961-1969)

Après plusieurs années de détention, une amnistie est accordée aux leaders du Sanwi en 1961, et le roi Amon N’douffou III ainsi que ses co-accusés sont libérés. Toutefois, l’affaire ne se clôt pas là. Le roi et ses partisans continuent de revendiquer l’indépendance du Sanwi depuis leur exil au Ghana.

En 1962, après le renversement de Nkrumah, les exilés du Sanwi sont arrêtés et extradés vers la Côte d’Ivoire. Le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny, soucieux de rétablir la paix, organise une réunion à l’Assemblée nationale et offre la possibilité d’une réconciliation. Une loi d’amnistie est votée en faveur des exilés, et un processus de réintégration commence.

La résurgence du conflit et les tentatives de dialogue (1969-1973)

Le mouvement pour l'indépendance du Sanwi connaît une nouvelle flambée de tensions en 1969, notamment après que la Côte d'Ivoire ait reconnu la sécession du Biafra au Nigéria, un geste qui a ravivé les espoirs de certains partisans du Sanwi pour une indépendance similaire.

L’attaque contre l’intégrité du territoire ivoirien par le mouvement du Sanwi refait surface, et des arrestations ont lieu dans les années suivantes. En 1973, après plusieurs années de dialogue, de tensions, et d’espoirs déçus, le conflit semble enfin apaisé, bien que non résolu définitivement. Le président Houphouët-Boigny décide d’apporter une solution par la réintégration du roi Amon N’douffou III sur son trône, en signe de réconciliation et de stabilisation de la région.

La fin de l’Affaire du Sanwi

L’Affaire du Sanwi se termine officiellement au début des années 1980. Le président FHB decide d'amnistier les derniers détenus et valide l’accord de réintégration du roi et des autorités traditionnelles. Il a même participé à la cérémonie d’intronisation du nouveau roi du Sanwi.