Livraison urbaine : l’État confie l’organisation du secteur à La Poste de Côte d’Ivoire
Le gouvernement ivoirien engage une réforme d’ampleur pour reprendre le contrôle d’un secteur devenu stratégique mais largement désorganisé : la livraison urbaine de petits colis. Longtemps dominée par des acteurs opérant dans l’informel, cette activité est aujourd’hui pointée du doigt pour son impact sur la circulation et la sécurité routière à Abidjan.
Selon des chiffres relayés par le média L’Infodrome, entre 80 et 90 % des cas d’indiscipline routière dans la capitale économique impliqueraient des livreurs, souvent sans agrément, sans immatriculation légale et sans couverture fiscale. Une situation que l’État juge incompatible avec les exigences actuelles de mobilité urbaine et de développement du e-commerce.
Une réforme fondée sur un dispositif légal existant
Contrairement à certaines perceptions, cette initiative n’est pas une mesure improvisée. Les autorités expliquent qu’il s’agit de l’activation d’un dispositif déjà prévu par la loi, visant à structurer la logistique urbaine et la livraison du dernier kilomètre.
Dans ce cadre, La Poste de Côte d’Ivoire a été désignée comme opérateur central, avec un double rôle de régulateur et d’agrégateur du secteur. Sa mission : encadrer les activités de livraison, améliorer la traçabilité des flux et instaurer des standards professionnels communs.
Pour Isaac Gnamba Yao, Directeur Général de La Poste de Côte d’Ivoire, cette réforme représente une opportunité stratégique :
C’est une excellente nouvelle pour l’industrie postale, mais surtout une opportunité de moderniser La Poste pour l’adapter aux exigences du e-commerce et de la logistique urbaine.
a-t-il déclaré lors d’une rencontre avec les acteurs du secteur initiée par la Direction Générale des Transports Terrestres.(L'Infodrom)
La Poste officiellement chargée d’encadrer la logistique urbaine
Dans un communiqué publié sur sa page officielle, La Poste de Côte d’Ivoire confirme son rôle d’opérateur désigné par l’État. L’entreprise publique indique « assumer la responsabilité d’encadrer la logistique urbaine et la livraison du dernier kilomètre », dans le cadre de la réforme visant à réorganiser la circulation des motos à Abidjan.
Cette mission confère à La Poste un rôle central dans l’organisation du secteur, avec pour objectif d’instaurer un cadre structuré, mieux contrôlé et conforme aux exigences de sécurité et de traçabilité.
La Poste comme agrégateur central des activités de livraison
Toujours selon le communiqué, La Poste affiche une volonté affirmée de se positionner comme l’agrégateur central des activités de livraison urbaine. Cette approche vise à permettre :
un meilleur contrôle des opérations,
un suivi optimisé des flux,
une traçabilité renforcée de l’ensemble du secteur.
Il s’agit, selon l’institution, de structurer un domaine jusque-là majoritairement informel, en centralisant les informations et en harmonisant les pratiques, sans exclure les acteurs existants.
Recensement dès janvier 2026 : un calendrier précis
Le ministère des Transports a dévoilé une feuille de route précise pour la mise en œuvre de la réforme. Le processus débutera dès janvier 2026 par un recensement exhaustif de tous les acteurs de la livraison, qu’ils soient indépendants ou structurés en entreprises.
Ce recensement se déroulera en plusieurs étapes :
un enregistrement en ligne dans un premier temps ;
suivi d’une phase en présentiel pour la finalisation des dossiers.
Les autorités précisent que cette opération sera gratuite dans un premier temps et accompagnée de mesures transitoires, afin de faciliter la mise en conformité progressive des livreurs déjà en activité.
Vers la professionnalisation et la protection du livreur
Au-delà des enjeux de circulation, la réforme vise également à revaloriser et sécuriser le métier de livreur. Le passage de l’informel au formel doit permettre aux acteurs du secteur d’accéder à un cadre plus protecteur.
Parmi les bénéfices attendus :
un accès facilité à l’assurance ;
des opportunités de crédit ;
des programmes de formation et de certification ;
une reconnaissance administrative officielle.
L’objectif affiché est de structurer durablement un métier devenu indispensable à l’économie urbaine moderne.
Réactions, inquiétudes et attentes sur les réseaux sociaux
Dominé par de nombreuses entreprises privées et des milliers de livreurs indépendants, le secteur de la livraison urbaine n’a pas tardé à réagir à l’annonce du rôle central confié à La Poste de Côte d’Ivoire. Sur les réseaux sociaux, plusieurs acteurs expriment leurs interrogations quant à l’impact réel de cette réforme sur leur activité.
Beaucoup s’interrogent notamment sur la manière dont cette nouvelle organisation pourrait influencer leurs méthodes de travail, leur autonomie et leur rendement économique. La crainte d’une concurrence indirecte, malgré les assurances de non-concurrence formulées par La Poste, revient.
Avec cette réforme, l’État ivoirien affiche clairement sa volonté de reprendre la main sur un secteur clé mais longtemps laissé à lui-même. En confiant à La Poste de Côte d’Ivoire le rôle d’acteur central, les autorités misent sur une structuration progressive, inclusive et orientée vers la professionnalisation.
À l’horizon janvier 2026, le défi sera de concilier exigence réglementaire, sécurité routière et dynamisme économique, dans un secteur en pleine mutation et sous le regard attentif de l’opinion publique.