Le magnat nigérian, Aliko Dangote, a récemment déclaré que sa nouvelle raffinerie aidera le Nigeria à économiser environ 40 % des dépenses en devises, ce qui correspond à la somme consacrée à l'importation de produits pétroliers raffinés sur les marchés internationaux. Une bonne nouvelle quand on sait que les produits pétroliers reviennent chers au Nigeria. Qu'en est-il ?
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"L’importation de carburants absorbe environ 40 % des réserves de change du pays. Avec cette raffinerie, nous réduisons la pression sur la monnaie locale", a-t-il expliqué lors d’un entretien avec Bloomberg.
Selon les données fournies par l'International Trade Center (Intracen), les produits pétroliers et connexes, qui représentent 20,3 milliards de dollars, ont constitué près de 33,5 % des importations du Nigeria en 2023, sur un total de 60,3 milliards de dollars. Dangote compte atteindre ses objectifs grâce à un accord avec le gouvernement, qui lui permet d'acheter du pétrole brut avec des nairas et de vendre les produits raffinés sur le marché local dans la même monnaie.
"C'est une situation gagnant-gagnant pour toutes les parties. Il serait surprenant qu'une entreprise comme la nôtre demande à être payée en dollars. Notre but est de laisser un héritage significatif au Nigeria. Pour la première fois, le pays deviendra un producteur de pétrole qui n’a plus besoin d'importer des produits raffinés. Jusqu’à présent, seuls l'Algérie et la Libye y parvenaient", a précisé M. Dangote, en soulignant l'impact potentiel de son projet, qui a nécessité un investissement de plus de 20 milliards de dollars.
Un accord en préparation avec la Nigerian National Petroleum Corporation (NNPC) prévoit la livraison de 12 millions de barils de pétrole brut à la raffinerie de Dangote en octobre 2024, soit environ 390 000 barils par jour. La raffinerie traitera ce pétrole pour produire de l’essence, du diesel, et du kérosène pour les avions, tout en maximisant la transformation des produits dérivés pour les commercialiser.
Dépréciation du naira
Cette raffinerie entre en activité à un moment délicat pour le Nigeria, avec une dépréciation de 70 % de sa monnaie depuis que le président Bola Tinubu a modifié la politique de gestion des réserves en dollars. Malgré la hausse mondiale des prix des produits pétroliers, la qualité du pétrole nigérian et les coûts maîtrisés permettent à Dangote de proposer un produit compétitif à l’échelle internationale.
D'après Trading Economics, le prix final de l’essence au Nigeria, incluant les taxes, est de 0,39 dollar le litre, un tarif plus abordable que dans des pays comme l’Arabie saoudite ou les Émirats arabes unis. En Afrique, seul l’Égypte offre des prix plus bas, mais cela est dû à une forte politique de subventions. Dans la plupart des pays voisins francophones, le prix du carburant est au moins 60 % plus élevé.
En plus de réduire les importations, la raffinerie de Dangote vise à mieux contrôler la consommation de carburants au Nigeria. L’homme d'affaires a annoncé que chaque véhicule ou bateau transportant ses produits sera surveillé afin d’offrir aux autorités une meilleure compréhension des besoins réels du marché. En plus des économies en devises, la production de Dangote pourra aussi être exportée sous diverses formes, générant ainsi des revenus supplémentaires pour le pays.
Dangote est conscient des difficultés qui l’attendent face à ces concurrents capables de réduire leurs prix pour rester compétitifs. "Ce que je n'avais pas anticipé, c'est la puissance du secteur pétrolier, qui peut se comparer à celle d’un cartel de la drogue. Ils peuvent choisir de vendre à bas prix pour me concurrencer, mais ils devront accepter d’être payés en nairas. De plus, notre capacité de production est le double des besoins du Nigeria", a-t-il affirmé, soulignant qu’il pourrait saturer l’offre sur le marché.
L'évolution des ventes de produits pétroliers au Nigeria sera à surveiller de près, notamment pour les entreprises cotées à la Bourse de Lagos, comme la filiale locale de TotalEnergies.